Les points clés – Définition de l’ostéomalacie oncogénique
L’ostéomalacie oncogénique (Tumor-Induced Osteomalacia (TIO)) est un syndrome paranéoplasique caractérisé par une perte rénale de phosphate et une déminéralisation osseuse. Cette pathologie est induite par la présence de petites tumeurs à croissance lente d’origine mésenchymateuse situées majoritairement dans la tête, le cou et les jambes. Celles-ci sécrètent une concentration élevée de facteur de croissance des fibroblastes (Fibroblast Growth Factor (FGF23)), l’un des principaux régulateurs physiologiques du métabolisme des phosphates.1-4
Au niveau génétique, la présence d’une fusion entre le gène codant la fibronectine et FGFR1 codant le récepteur du facteur de croissance des fibroblastes est retrouvée dans environ 40% des petites tumeurs mésenchymateuses causant une ostéomalacie oncogénique. Il est à ce jour supposé que cette fusion conduirait à une activation accrue de FGFR1 entraînant une augmentation de la signalisation liée à FGFR1, de l’expression de FGF23 et favoriserait la croissance tumorale.5
La prévalence de l’ostéomalacie oncogénique est inconnue. Depuis sa première description, moins de 1000 cas d’ostéomalacie oncogénique ont été rapportés. La maladie survient habituellement chez l’adulte avec un début des symptômes situé entre 40 et 50 ans mais quelques cas ont été rapportés chez l’enfant et la personne âgée.2
Les manifestations sont avant tout secondaires à l’hypophosphatémie (faible taux de phosphate dans le sang) et l’hyperphosphaturie (fort taux de phosphate dans les urines) chroniques. Les tumeurs mises en cause sont souvent petites et bénignes, n’entraînant habituellement pas de manifestation locale. Les principaux symptômes retrouvés sont non spécifiques. Les plus fréquents sont la présence de douleurs osseuses accompagnées de difficultés à marcher, des fractures spontanées, une faiblesse musculosquelettique ou encore une fatigue prononcée. Chez l’enfant, l’ostéomalacie oncogénique cause également un retard de croissance et un rachitisme.1,5-8
Le diagnostic repose principalement sur la mise en évidence d’une hypophosphatémie associée à une hyperphosphaturie, une concentration faible de 1,25-OH vitamine D et souvent élevée de FGF23 et la détection d’une tumeur mésenchymateuse.2,9
La prise en charge consiste, si la tumeur est localisée, à effectuer une exérèse totale de celle-ci par chirurgie, ce qui permet de guérir de cette pathologie. Si cette ablation totale n’est pas réalisable ou que la tumeur n’est pas localisable, des traitement médicamenteux peuvent être mis en place.2,7
Références
- Fiche Orphanet – ostéomalacie oncogénique : https://www.orpha.net/consor/cgi-bin/OC_Exp.php?lng=FR&Expert=352540#:~:text=Syndrome%20paran%C3%A9oplasique%20rare%20caract%C3%A9ris%C3%A9%20par,est%20responsable%20de%20l’hyperphosphaturie.
- Brandi ML, et al. Challenges in the management of tumor-induced osteomalacia (TIO). Bone. 2021;152:116064.
- Hautmann AH, et al. Tumor-Induced Osteomalacia: an Up-to-Date Review. Curr Rheumatol Rep. 2015;17(6):512.
- Bosman A, et al. Tumor-Induced Osteomalacia: A Systematic Clinical Review of 895 Cases. Calcif Tissue Int. 2022;111(4):367-379.
- Florenzano P, et al. Tumor-Induced Osteomalacia. Calcif Tissue Int. 2021;108(1):128-142.
- Minisola S, et al. A literature review to understand the burden of disease in people living with tumour-induced osteomalacia. Osteoporos Int. 2022;33(9):1845-1857.
- Yin Z, et al. Tumor-induced osteomalacia. Osteoporos Sarcopenia. 2018;4(4):119-127.
- Feng J, et al. The diagnostic dilemma of tumor induced osteomalacia: a retrospective analysis of 144 cases. Endocr J. 2017;64(7):675-683.
- Jan de Beur SM, et al. Global guidance for the recognition, diagnosis, and management of tumor-induced osteomalacia. J Intern Med. 2023;293(3):309-328.
Les symptômes de l’ostéomalacie oncogénique
Les symptômes de l’ostéomalacie oncogénique sont variables selon les individus atteints de cette maladie. Les personnes atteintes peuvent ainsi présenter :1-5
- Douleurs osseuses et articulaires
Ostéomalacie, fractures spontanées
- Fatigue, faiblesse musculaire, atrophie et fonte musculaire
- Difficultés à marcher, troubles de la mobilité
- Gonflement des articulations
- Déformations thoraciques et de la colonne vertébrale
- Raideur
- Diminution de la taille
- Perte de poids
- Perte d’une ou plusieurs dents
- Obstruction nasale
- Troubles visuels
- Spasmes
Pour en savoir plus sur les symptômes de l’ostéomalacie oncogénique, retrouvez les explications du Pr Houillier sur RARE à l’écoute, le podcast dédié aux maladies rares, en cliquant ici.
Références
- Minisola S, et al. A literature review to understand the burden of disease in people living with tumour-induced osteomalacia. Osteoporos Int. 2022;33(9):1845-1857.
- Bosman A, et al. Tumor-Induced Osteomalacia: A Systematic Clinical Review of 895 Cases. Calcif Tissue Int. 2022;111(4):367-379.
- Brandi ML, et al. Challenges in the management of tumor-induced osteomalacia (TIO). Bone. 2021;152:116064.
- Florenzano P, et al. Tumor-Induced Osteomalacia. Calcif Tissue Int. 2021;108(1):128-142.
- Feng J, et al. The diagnostic dilemma of tumor induced osteomalacia: a retrospective analysis of 144 cases. Endocr J. 2017;64(7):675-683.
Dépistage et diagnostic de l’ostéomalacie oncogénique
Le diagnostic de l’ostéomalacie oncogénique repose sur :1,2
- Un examen physique approfondi du patient avec la mesure la taille et des proportions corporelles, la recherche de déformations des membres, d’anomalies crâniofaciales et un examen dentaire. Le corps entier doit être palpé pour mettre en évidence la présence d’une éventuelle masse;
- La détection d’une hypophosphatémie associée à une hyperphosphaturie;
- La mesure du ratio de phosphore filtré qui est réabsorbé par les reins, ce ratio étant faible chez les patients présentant une ostéomalacie oncogénique ;
- Une analyse sanguine démontrant une concentration faible de 1,25-OH vitamine D et souvent élevée de FGF23;
- Une analyse génétique afin d’éliminer d’autres pathologies pouvant entraîner une hypophosphatémie ;
- La localisation d’une tumeur mésenchymateuse.
Références
- Brandi ML, et al. Challenges in the management of tumor-induced osteomalacia (TIO). Bone. 2021;152:116064.
- Jan de Beur SM, et al. Global guidance for the recognition, diagnosis, and management of tumor-induced osteomalacia. J Intern Med. 2023;293(3):309-328.
Les diagnostics différentiels de l’ostéomalacie oncogénique
Dans le cas de l’ostéomalacie oncogénique, le risque de mauvais diagnostic initial est d’environ 95%.1
Les principaux diagnostics différentiels sont les suivants :1-5
- Causes génétiques d’hypophosphatémie : plusieurs maladies génétiques induisent une hypophosphatémie comme l’hypophosphatémie liée au chromosome X (XLH), l’hypophosphatémie autosomique dominante (ADHR), le rachitisme hypophosphatémique autosomique récessif (ARHR) ou encore le syndrome de Fanconi ;
- Causes acquises : la plupart des formes acquises d’hypophosphatémie sont le résultat d’une atteinte tubulaire rénale directe causée par un médicament ou une toxine ;
- Pathologies en rhumatologie : la hernie discale, la spondylarthrite et l’ostéoporose sont les erreurs de diagnostic les plus fréquentes ;
- Pathologies induisant une malabsorption de la vitamine D : un faible taux de vitamine D étant retrouvé chez les patients ayant une ostéomalacie oncogénique, celle-ci peut être confondue avec certains troubles gastrointestinaux et hépatiques induisant une malabsorption de cette vitamine.
Pour en savoir plus sur les diagnostics différentiels de l’ostéomalacie oncogénique, retrouvez les explications du Dr Couture sur RARE à l’écoute, le podcast dédié aux maladies rares, en cliquant ici.
Références
- Feng J, et al. The diagnostic dilemma of tumor induced osteomalacia: a retrospective analysis of 144 cases. Endocr J. 2017;64(7):675-683.
- Chong WH, et al. Tumor-induced osteomalacia. Endocr Relat Cancer. 2011;18(3):R53-77.
- Hautmann AH, et al. Tumor-Induced Osteomalacia: an Up-to-Date Review. Curr Rheumatol Rep. 2015;17(6):512.
- Yang M, et al. Molecular Imaging in Diagnosis of Tumor-induced Osteomalacia. Curr Probl Diagn Radiol. 2019;48(4):379-386.
- Jan de Beur SM, et al. Global guidance for the recognition, diagnosis, and management of tumor-induced osteomalacia. J Intern Med. 2023;293(3):309-328.
La prise en charge de l’ostéomalacie oncogénique
La prise en charge de l’ostéomalacie oncogénique repose principalement sur la détection et la résection tumorale totale. Cette résection, si réalisée dans son intégralité, constitue le seul traitement définitif permettant de guérir cette pathologie. Elle s’accompagne d’une rapide normalisation des taux de phosphate sérique à jeun, de FGF23 et de 1,25-OH vitamine D chez la plupart des patients. De plus, une nette diminution des symptômes des patients est présente une fois l’homéostasie du phosphate rétablie.1,2
Pour en savoir plus sur la prise en charge de l’ostéomalacie oncogénique, retrouvez les explications du Pr Paccou sur RARE à l’écoute, le podcast dédié aux maladies rares, en cliquant ici.
L’identification de la localisation tumorale s’effectue dans un premier temps via un examen physique approfondi du patient. Si cet examen n’est pas suffisant, des examens complémentaires sont nécessaires. Des tests d’imagerie fonctionnelle du corps entier doivent être réalisés. Il est recommandé d’utiliser en premier lieu la tomographie par émission de positrons (PET scan). Une fois les lésions repérées par l’imagerie fonctionnelle, une confirmation et une analyse de l’anatomie de la lésion est réalisée par radiographie, échographie, tomodensitométrie ou encore imagerie par résonance magnétique (IRM). En parallèle, des prélèvements sanguins veineux étagés avec mesure de la concentration en FGF23 peuvent contribuer à localiser la tumeur.2
Comme les tumeurs peuvent être localisées n’importe où dans le corps, des chirurgiens de différentes spécialités sont possiblement impliqués dans l’opération d’ablation de la tumeur. Si cette tumeur est unique, sa résection totale est possible si l’opération ne risque pas d’affecter les structures environnantes. Si la localisation tumorale impose une chirurgie très mutilante, l’ablation par radiofréquence a aussi été décrite. Cependant, la résection peut devenir impossible à pratiquer ou être réalisée partiellement. Dans ces deux situations, une radiothérapie est réalisée de façon à diminuer la charge tumorale. Un traitement substitutif à base de phosphate et de vitamine D active ou visant à restaurer une concentration normale de FGF23 sont également proposés.1-3
En termes de suivi après opération pour les patients ayant eu une résection tumorale totale, le taux de phosphate doit être mesuré fréquemment jusqu’à normalisation puis contrôlé annuellement. Lors d’une suspicion de récurrence, une évaluation biochimique similaire à celle effectuée lors du diagnostic doit être répétée et associée à une imagerie anatomique et fonctionnelle. Pour les autres patients n’ayant pas pu bénéficier d’une résection totale tumorale, un bilan biochimique est réalisé tous les 3 à 4 mois. Tous les ans, en cas de tumeur initialement non identifiable, une imagerie fonctionnelle est réalisée alors qu’une imagerie anatomique est prescrite pour les patients ayant une tumeur non totalement résécable.2
Références
- Brandi ML, et al. Challenges in the management of tumor-induced osteomalacia (TIO). Bone.2021;152:116064.
- Yin Z, et al. Tumor-induced osteomalacia. Osteoporos Sarcopenia. 2018;4(4):119-127.
- Rest et al. Hypophosphatémie et ostéomalacie oncogénique. Rev Med Suisse. 2011;7:1630-3.
La parole aux patients atteints d’ostéomalacie oncogénique
Afin d’améliorer la prise en charge et le suivi des patients atteints d’ostéomalacie oncogénique, il est important de sensibiliser le grand public à cette maladie rare et les professionnels de santé au diagnostic et à la prise en charge précoce.1
Améliorer l’information des patients et des professionnels de santé pour faciliter le diagnostic et optimiser la prise en charge des patients sont les objectifs des Filières de Santé Maladies Rares, des Centres de Référence Maladies Rares et des réseaux européens qui apportent leur savoir-faire et leur expertise. Pour l’ostéomalacie oncogénique, la filière OSCAR (maladies rares de l’os, du calcium et du cartilage) est en 1ère ligne.2
Pour en savoir plus sur l’errance diagnostique dans l’ostéomalacie oncogénique, retrouvez le témoignage de Mme Desbarbieux sur RARE à l’écoute, le podcast dédié aux maladies rares, en cliquant ici.
Au-delà de l’accompagnement des malades dans le parcours de soins, la filière OSCAR a pour objectifs de :2,3
- Améliorer la prise en charge des personnes atteintes de maladies rares tout au long de leur parcours ;
- Coordonner la recherche fondamentale, translationnelle, clinique et organisationnelle;
- Promouvoir l’enseignement, la formation et l’information;
- Harmoniser les pratiques au niveau européen et international.
Références
- Brandi ML, et al. Challenges in the management of tumor-induced osteomalacia (TIO). Bone.2021;152:116064.
- Filière maladies rares OSCAR : https://www.filiere-oscar.fr/
- Filière maladies rares OSCAR, missions : https://www.filiere-oscar.fr/13538-missions.htm
Les spécialistes de l’ostéomalacie oncogénique
Pour plus d’informations sur la neurofibromatose de type 1, vous pouvez consulter les articles, vidéos et sites web ci-dessous :
- Page Orphanet – Ostéomalacie oncogénique : https://www.orpha.net/consor/cgi-bin/Disease_Search.php?lng=FR&data_id=22076&Disease_Disease_Search_diseaseGroup=Osteomalacie-oncogenique&Disease_Disease_Search_diseaseType=Pat&Maladie(s)/groupes%20de%20maladies=Osteomalacie-oncogenique&title=Ost%E9omalacie%20oncog%E9nique&search=Disease_Search_Simple
- Filière OSCAR : https://www.filiere-oscar.fr/
- Ostéomalacie oncogénique ou TIO – Filière OSCAR : https://www.filiere-oscar.fr/annuaire/29469/13543-osteomalacie-oncogenique-ou-tio.htm
- European Rare Kidney Disease Reference Network (ERKNet) : https://www.erknet.org/
- Rest et al. Hypophosphatémie et ostéomalacie oncogénique. Rev Med Suisse. 2011;3 (306):1630–1633.
- Feng J, et al. The diagnostic dilemma of tumor induced osteomalacia: a retrospective analysis of 144 cases. Endocr J. 2017;64(7):675-683.
- Chong WH, et al. Tumor-induced osteomalacia. Endocr Relat Cancer. 2011;18(3):R53-77.
- Hautmann AH, et al. Tumor-Induced Osteomalacia: an Up-to-Date Review. Curr Rheumatol Rep. 2015;17(6):512.
- Yang M, et al. Molecular Imaging in Diagnosis of Tumor-induced Osteomalacia. Curr Probl Diagn Radiol. 2019;48(4):379-386.
- Jan de Beur SM, et al. Global guidance for the recognition, diagnosis, and management of tumor-induced osteomalacia. J Intern Med. 2023;293(3):309-328.
- Minisola S, et al. A literature review to understand the burden of disease in people living with tumour-induced osteomalacia. Osteoporos Int. 2022;33(9):1845-1857.
- Bosman A, et al. Tumor-Induced Osteomalacia: A Systematic Clinical Review of 895 Cases. Calcif Tissue Int. 2022;111(4):367-379.
- Brandi ML, et al. Challenges in the management of tumor-induced osteomalacia (TIO). Bone. 2021;152:116064.
- Florenzano P, et al. Tumor-Induced Osteomalacia. Calcif Tissue Int. 2021;108(1):128-142.
- Feng J, et al. The diagnostic dilemma of tumor induced osteomalacia: a retrospective analysis of 144 cases. Endocr J. 2017;64(7):675-683.